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Delphine LARSONNIE . mars 25 . 6 min de lecture
COMMENT ET POURQUOI ÉCOUTER NOS ÉMOTIONS
Dernière mise à jour : 5 avril 2022
Pendant longtemps on a opposé la raison aux émotions, et on considérait qu’elles étaient un frein au développement de notre intelligence.
Dans les années 1990, les psychologues Américain Peter SALOVEY et John MAYER ont effectués des travaux sur les émotions et ont mis à jour le concept d’intelligence émotionnelle. Elle se définit comme « l’habileté à percevoir et à exprimer les émotions, à les intégrer pour faciliter la pensée, à comprendre et à raisonner avec les émotions, ainsi qu’à réguler les émotions chez soi et chez les autres ».
Mais qu’est-ce qu’une émotion au juste ?
Étymologiquement, le mot émotion vient du latin avec le préfixe « e » (variante de « ex »), signifiant hors de, à l’extérieur de, et le verbe « movere » qui signifie bouger, se mouvoir.
Le but d’une émotion est donc de nous mettre en mouvement…
Et oui, une émotion se présente toujours pour nous délivrer un message, nous guider, nous pousser à agir. Malheureusement notre éducation nous a trop souvent appris à les ignorer, à les étouffer, et à les réprimer. En faisant cela, nous ignorons nos besoins et nous ne prêtons pas attention aux alertes que notre corps nous envoie. Or, comme « tout ce qui ne s’exprime pas s’imprime », si nous ne prenons pas conscience du message ainsi délivré, c’est un peu comme si nous gardons un poison à l’intérieur de nous-même, et il est possible que notre corps trouve un autre moyen pour nous faire passer le message, comme installer une maladie par exemple.
C’est pourquoi il est essentiel d’accueillir chaque émotion, positive ou négative, et de comprendre quel est le message qui s’en dégage : Qu’est-ce que notre corps essaye de nous dire ? Que devons-nous faire, changer, arrêter, comprendre ou accepter ?
En 1972, l’anthropologue et psychologue américain Paul Ekman a répertorié 6 émotions de bases, dites « primaires » d’après des études sur les expressions des visages de personnes issues de 15 cultures différentes.
Ces 6 grandes catégories sont les émotions liées à la Joie, la Tristesse, la Colère, la Peur, la Surprise et le Dégoût.
Toutes les autres émotions « secondaires » s’apparentent de près ou de loin à l’une de ces six émotions de base. Chacune des six grandes catégories d’émotions est déclenchée par des situations particulières, induit le même type de comportement et nous fait dégager le même type de langage corporel.
LA COLÈRE
La colère est une réaction de protection, une forme de refus de ce que nous vivons, une façon de dire « non » face à une situation donnée, mais peut également nous avertir d’un besoin non satisfait. Elle nous pousse à nous sortir d’une situation d’impuissance ou indique un besoin de contrôler la situation.
Déclencheur : frustration devant un obstacle, sentiment d’injustice, dommage, atteinte à son intégrité ou à ses valeurs.
Comportement : attaque ou toute autre action « défouloirs » visant à éliminer les tensions.
Langage corporel : teint rouge, lèvres pincées, yeux exorbités, cris, hurlements.
Besoins à satisfaire : être entendu, changement, réparation, contrôler une situation.
Actions à mener : prendre du recul, prendre le temps de comprendre ce qui a déclenché la colère, réfléchir sur les priorités dans la vie et d’éventuelles croyances limitantes.
Émotions associées : agacement, agressivité, contrariété, culpabilité, énervement, exaspération, frustration, haine, hostilité, impatience, irritation, jalousie, mécontentement, nervosité.
Lorsque la colère apparaît, on observe généralement deux types de réactions :
-
L’explosion : la colère prend une forme de crise et le volcan explose : cris, hurlements, coups de pieds ou de poings, etc. Elle s’exprime.
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L’implosion : la colère est gardée à l’intérieur, on ne veut pas se montrer vulnérable alors on « ravale sa colère », on l’accumule à l’intérieur de soi par le ressentiment. Elle s’imprime.
Aucune de ces deux réactions n’est saine aussi bien pour nous même que pour notre entourage. Dans le premier cas, on perd le contrôle et on fait du mal aux autres, dans le second cas on se fait du mal à soi-même. Pour gérer sa colère sans se faire de mal, il faut avant tout prendre conscience du message qu’elle nous délivre. Lorsque la colère commence à poindre son nez, l’attitude la plus saine est de prendre un moment de recul et analyser la situation « de l’extérieur », de manière objective, quitte à arrêter une entrevue et la remettre à plus tard.
Évidemment, le savoir est une chose, le faire est une autre histoire. Lorsque la colère pointe son nez, on est submergé par l’émotion et on n’arrive plus à penser de manière rationnelle. La sophrologie pratiquée de manière régulière permet d’acquérir les bons réflexes pour gérer ce genre de situation.
Il est toujours important de pouvoir analyser sa colère « à froid », une fois qu’on a repris ses esprits : Pourquoi ai-je ressenti cette colère ? Quel est le message qu’elle véhicule ? Ai-je un besoin qui n’est pas satisfait ? A-t-on porté atteinte à mon intégrité, à mes valeurs ?
Les réponses à ces questions permettront de mieux gérer ses émotions lors du prochain accès de colère.
LA TRISTESSE
La tristesse est un relâchement émotionnel qui se produit lors d’une perte, d’un manque, ou d’un souhait non satisfait. Les moments de tristesse nous invitent à réfléchir sur nous-même, au-delà de la situation.
Déclencheur : perte, deuil, manque, échec.
Comportement : repli sur soi.
Langage corporel : regard abattu, posture affaissée, yeux brillants (pleurs), lèvres tombantes, voix monocorde.
Besoins à satisfaire : réconfort, consolation.
Actions à mener : accepter et exprimer sa tristesse, et le moment venu se remettre en mouvement en démarrant des activités positives.
Émotions associées : accablement, affection, anéantissement, blessure, chagrin, déception, déprime, désespoir, envie, honte, mélancolie, nostalgie.
Il faut voir la tristesse comme une période d’apprentissage, un moment d’acceptation lors du passage d’une situation à une autre. D’une part, elle nous invite à nous retirer, et à réfléchir à nos besoins pour pouvoir nous adapter à un changement de vie. D’autre part, elle provoque l’empathie des autres et nous protège de l’agressivité et des attaques extérieures.
La tristesse peut être assez violente sur le plan émotionnel et peut s’accompagner de symptômes très difficiles à vivre (douleurs à la poitrine, sensations de brûlures, sensation de déchirement interne). Les larmes permettent de soulager les tensions liées à ces symptômes, d’évacuer le trop-plein de douleur.
Pour gérer au mieux la tristesse, il faut tout d’abord l’accepter, l’exprimer, puis, lorsqu’on se sent prêt, se remettre doucement dans l’action et renouer avec des activités qui amènent du plaisir.
Parfois il est tentant de réprimer sa douleur en prenant soin de toujours occuper son esprit et en se noyant dans des tas d’activités diverses et variées. Mais comme toujours, ne pas prendre en compte une émotion ne fait que reporter le problème et l’amplifier. Pour pouvoir passer à une situation, il faudra donc la vivre en conscience et laisser le temps faire son œuvre.
LA JOIE
La joie est une émotion formidable à partager. C’est l’énergie du bien-être qui illumine notre vie, quand nous sommes en compagnies de personnes sympathiques, lorsque nous sommes alignés avec nos valeurs, et que nous pouvons nous réaliser pleinement.
La joie génère du plaisir et nous indique que la situation que nous vivons est une bonne chose pour nous. Elle est généralement éphémère (ce qui la différencie du bonheur qui lui s’inscrit dans la durée).
Déclencheur : désir, réussite, bien-être, accomplissement, anticipation d’un évènement heureux.
Comportement : approche, ouverture, rire.
Langage corporel : sourire, yeux pétillants, détente, bras et jambes écartés, mains ouvertes.
Besoins à satisfaire : partage.
Actions à mener : maintenir les sensations.
Émotions associées : amusement, amour, confiance, contentement, émerveillement, enchantement, enthousiasme, euphorie, gaieté, bonheur, optimisme, passion, ravissement, satisfaction, sécurité, soulagement.
Du point de vue physiologique, la joie agit en profondeur et provoque la sécrétion d’endorphines, ce qui a par ailleurs l’avantage de renforcer notre système immunitaire. Elle nous pousse à agir en nous donnant de l’entraîne et l’envie d’avancer, c’est l’émotion de la réussite et de l’élan.
Enfin, la joie nous indique que nous sommes sur la bonne voie, le message qu’elle nous délivre est donc de continuer sur ce chemin.
Cette émotion capitale est encore plus forte si elle est partagée, car la joie est communicative, et s’accompagne d’un élan pour transmettre cette sensation qui est souvent contagieuse.
Malheureusement, dans notre société, il arrive que cette émotion ne soit pas politiquement correcte et doive être réprimée, bien que positive. Au travail notamment, il n’est pas bien vu de rire et d’exprimer sa joie, cela ne fait pas très sérieux et nous manquons de belles occasions de vivre des moments heureux. La répression de la joie nous conduit à un état de passivité, de manque d’entrain, de morosité.
Il ne faut donc pas hésiter à exprimer sa joie lorsqu’elle se présente et que nous pouvons le faire, cela nous fait du bien tant à nous-même qu’à notre entourage.
LA PEUR
La peur est une émotion indispensable dont le rôle principal est d’assurer notre sécurité ; c’est l’instinct de survie en chacun de nous qui va nous permettre de nous préparer à un évènement.
La peur est un radar qui nous guide dans des actions de défense, et enclenche des mécanismes de stimulation du corps (augmentation du flux sanguin) pour être en condition de faire face au danger, que ce soit pour fuir ou combattre.
Déclencheur : menace, danger, inconnu.
Comportement : fuite, évitement ou attaque.
Langage corporel : pâleur, sueurs, agitation, palpitations.
Besoins à satisfaire : protection, contrôle, acceptation.
Émotions apparentées : angoisse, anxiété, crainte, épouvante, gêne, inquiétude, insécurité, méfiance, panique, soucis, timidité, tourmente.
Notre inconscient ne faisant pas la différence entre la réalité objective et notre imagination, nous avons parfois peur de manière irrationnelle. C’est pourquoi il est toujours important de bien comprendre l’objet de sa peur, afin de savoir si elle est justifiée ou non. Si le danger est réel, on pourra alors agir pour apporter des actions correctrices et la peur s’en ira d’elle-même. Dans le cas contraire, il faudra alors reprendre une vision objective de la situation et relativiser cette sensation.
Malheureusement certaines peurs ont des causes sur lesquelles on a aucun moyen d’action (la peur de la mort par exemple). Il faudra dans ce cas faire un travail d’acceptation.
Il est important de pouvoir exprimer ses peurs, d’en parler autour de soi. Si les signes de la peur ne peuvent pas s’exprimer en raison de l’environnement social, des pathologies chroniques peuvent apparaître telles que les phobies, l’angoisse, les TOC. Ce sont des peurs subjectives et récurrentes qu’il conviendra alors de faire suivre par un spécialiste.
Quoi qu'il en soit, cette émotion devra s’exprimer tôt ou tard, d’une manière ou d’une autre.
LA SURPRISE
La surprise est provoquée par un changement brusque et soudain. Il existe de bonne et de mauvaises surprises, mais dans les deux cas, elle nous aide à nous adapter à un l’évènement nouveau.
La surprise intervient lorsque nous percevons un évènement auquel on ne s’attend pas. C’est une émotion spontanée qui échappe totalement à notre contrôle, et il est quasiment impossible de la cacher.
Déclencheur : danger, inconnu, imprévu.
Comportement : retrait, sursaut.
Langage corporel : haussement de sourcils, yeux écarquillés, bouche ouverte.
Besoins à satisfaire : prendre le temps pour assimiler la nouvelle information.
Émotions apparentées : confusion, choc, enthousiasme, étonnement, insécurité, stupéfaction, trouble.
C’est une émotion à double tranchant qui peut être vécu de manière positive ou négative. Une fois ces sensation passées, d’autres émotions prendrons le relai en fonction de l’évènement qui vient d’être annoncé : joie, peur, colère, tristesse…
La surprise est génératrice d’un haut niveau de stress et comme lui, cet état n’est sain que lorsqu’il survient à intervalle raisonnable. Être trop souvent surpris et donc être soumis à beaucoup de changements et donc se mettre en tension inutilement. Cela révélerait une incapacité à anticiper les choses. C’est en analysant les fréquences de cette émotion que l’on pourra savoir si elles sont saines ou non.
LE DÉGOÛT
Le dégoût nous met en mouvement de recul lorsque nous sentons que quelque chose est nuisible à notre santé. Son but premier est de nous mettre à distance de toutes toxicités, qu’elles soient physiques ou psychiques.
Déclencheur : substance ou personne nuisible, aversion.
Comportement : rejet.
Langage corporel : mouvement de recul, grimace, regard méprisant.
Besoins à satisfaire : mettre de la distance.
Actions à mener : fuite.
Emotions associées : amertume, antipathie, aversion, contrariété, désenchantement, écœurement, Incommodité, Irritabilité, mépris.
La première chose à laquelle on pense est le dégoût par rapport à un aliment. Nous avons tous en mémoire au moins une image d’un enfant horrifié devant son assiette...
Mais nos valeurs et notre psychisme joue également un rôle important dans la sélection de ce qui nous dégoûte ou pas. Cela peut émaner du comportement d’une personne qui aura des attitudes agressives ou dégradantes, mais aussi de la personne elle-même si nous savons qu’elle nous veut du mal.
Le but du dégoût est de nous pousser à éviter un empoisonnement physique (aliments) ou psychique (comportement). Il est alors important d’écouter notre instinct de protection et se mettre à l’écart de l’objet de son dégoût.
Si malheureusement nous n’avons pas le choix d’accepter la situation, le « poison » va faire son effet et peut mener à des pathologies souvent liées à nos conduites alimentaires, mais aussi des troubles antisociaux.
Comme toujours, je ne peux que vous encourager à écouter vos émotions, à vous laisser guider par elles...
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